Ovide, L’Art d’aimer, livre I : Bacchus et Cupidon sont du banquet

Vénus, Bacchus et Cupidon (Cæsar van Everdingen, XVIIe s.)

Vénus, Bacchus et Cupidon (Cæsar van Everdingen, XVIIe s.)


[…] Tables mises, banquets, offrent d’autres approches,
Tu peux, outre les vins, y chercher ton bonheur.
Là, souvent, allongés, tenues dans ses bras tendres,
L’Amour serre, empourpré, les cornes de Bacchus.
L’aile mouillée de vin, humectée, Cupidon
Ne bouge plus du lieu qui le tient, lourd, captif.
– Mais voici qu’il secoue ses plumes imbibées
Et porte atteinte aux cœurs éclaboussés d’amour.
Le vin prépare l’âme, et la pourvoit d’ardeurs,
Il emporte en ses flots les tourments, qu’il dissipe.
C’est le moment qu’on rit ; le pauvre prend courage ;
Douleurs, tourments s’en vont, et les fronts se dérident.
Sous la simplicité – si rare à notre époque –,
Les cœurs s’ouvrent – le dieu leur fait tomber le masque.
Là, souvent, le tendron captive le jeune homme :
Car Vénus dans le vin, c’est du feu dans le feu. […]


[…] Dant etiam positis aditum convivia mensis:
Est aliquid praeter vina, quod inde petas.
Saepe illic positi teneris adducta lacertis
Purpureus Bacchi cornua pressit Amor:
Vinaque cum bibulas sparsere Cupidinis alas,
Permanet et capto stat gravis ille loco.
Ille quidem pennas velociter excutit udas:
Sed tamen et spargi pectus amore nocet.
Vina parant animos faciuntque caloribus aptos:
Cura fugit multo diluiturque mero.
Tunc veniunt risus, tum pauper cornua sumit,
Tum dolor et curae rugaque frontis abit.
Tunc aperit mentes aevo rarissima nostro
Simplicitas, artes excutiente deo.
Illic saepe animos iuvenum rapuere puellae,
Et Venus in vinis ignis in igne fuit. […]

(in Art d’aimer, livre 1 [vers 229-244])


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle. Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

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Ovide, L’Art d’aimer, livre II : sache prendre ton temps / Publius Ovidius Naso, Ars amatoria liber II.

[…] Crois-m’en : la volupté ne veut point qu’on la presse
Lutine sans hâter, sursois au dénouement.
Décèles-tu des points sensibles chez ta belle ?
Passe outre la pudeur, il les faut titiller –
Lors tu verras ses yeux briller d’un trouble éclat :
Du soleil reflété sur le tain d’une eau pure.
Viendront les petits cris, les plaisants chuchotis,
Les doux gémissements, les jasements  lascifs.
Surtout ne laisse pas, déployant ta voilure,
Ta maîtresse à la traîne, ou son char te doubler :
Allez tous deux au but : c’est pleine volupté
Quand vaincus, de concert l’homme et la femme exultent.
Ainsi faut-il aller, si tu en as le temps,
Si votre amour furtif peut s’attarder sans risque.
Mais si point quelque crainte : avance à toutes rames,
Et aux flancs du coursier donne de l’éperon. […]


Crede mihi, non est veneris properanda voluptas,
Sed sensim tarda prolicienda mora.
Cum loca reppereris, quae tangi femina gaudet,
Non obstet, tangas quominus illa, pudor.
Aspicies oculos tremulo fulgore micantes,
Ut sol a liquida saepe refulget aqua.
Accedent questus, accedet amabile murmur,
Et dulces gemitus aptaque verba ioco.
Sed neque tu dominam velis majoribus usus
Desere, nec cursus anteat illa tuos;
Ad metam properate simul: tum plena voluptas,
Cum pariter victi femina virque iacent.
Hic tibi versandus tenor est, cum libera dantur
Otia, furtivum nec timor urget opus.
Cum mora non tuta est, totis incumbere remis
Utile, et admisso subdere calcar equo.

(L’Art d’aimer, livre II [vers 717-732])


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle. Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

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