Hans Magnus Enzensberger (1929-2022) : Journée noire / Ein schwarzer Tag

Qui est Hans Magnus Enzensberger ?


Des jeudis pareils,
même le boucher le plus chevronné
se coupe un doigt.
Tous les trains sont en retard
car les suicidaires
ne peuvent plus se retenir.
L’ordinateur central au Pentagone
est en carafe depuis longtemps
et toutes les tentatives de réanimation
dans les piscines de plein air arrivent trop tard.

Pour comble de malheur,
chez les Marotzke, à côté
voilà qu’en plus le lait déborde,
le chien a des problèmes de digestion,
jusqu’à la tante Olga,
l’inaltérable,
qui n’est pas au sommet de sa forme.


An solchen Donnerstagen
hackt sogar der erfahrenste Metzger
sich einen Finger ab.
Alle Züge haben Verspätung,
weil sich die Selbstmörder
nicht mehr beherrschen können.
Der Zentralcomputer im Pentagon
ist schon lange zusammengebrochen,
und alle Wiederbelebungsversuche
in den Freibädern kommen zu spät.

Zu allem Überfluß
kocht nebenan bei Marotzkes
jetzt auch noch die Milch über,
der Hund hat Verdauungsbeschwerden,
und nicht einmal Tante Olga,
die Unverwüstliche,
ist so ganz auf der Höhe.

(in Gedichte 1950-2015. Suhrkamp Verlag, Frankfurt am Main 2015)

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle. Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

Hans Magnus Enzensberger (1929-2022) : Chansonnette optimiste / Optimistisches Liedchen

Qui est Hans Magnus Enzensberger ?


Il arrive de temps en temps
que quelqu’un crie au secours.
Déjà quelqu’un d’autre se jette à l’eau
sans en attendre aucun retour.

Au milieu du plus épais capitalisme
les pompiers rutilants tournent
la rue, éteignent le feu, ou le chapeau
du mendiant soudain brille d’un éclat d’argent.

Le matin, les rues fourmillent
de gens qui sans couteau tiré
s’empressent çà, là, le cœur serein,
cherchant du lait et des radis.

Comme dans la paix la plus profonde.

C’est magnifique à voir.


Hie und da kommt es vor,
daß einer um Hilfe schreit.
Schon springt ein andrer ins Wasser,
vollkommen kostenlos.

Mitten im dicksten Kapitalismus
kommt die schimmernde Feuerwehr
um die Ecke und löscht, oder im Hut
des Bettlers silbert es plötzlich.

Vormittags wimmelt es auf den Straßen
von Personen, die ohne gezücktes Messer
hin- und herlaufen, seelenruhig,
auf der Suche nach Milch und Radieschen.

Wie im tiefsten Frieden.

Ein herrlicher Anblick.

(in Leichter als Luft. Suhrkamp Verlag, Frankfurt am Main 1999)

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle. Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

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