Pêcheur de sens (à propos de L’Herbe folle, de Jean-Jacques Marimbert, aux éditions du Cygne)

De livre en livre, on lit la poésie de Jean-Jacques Marimbert pour l’étonnement qu’elle suscite, pour sa façon d’être chaque fois « ni tout à fait la même ni tout à fait une autre » et de nous faire croire qu’on la saisit enfin quand elle est insaisissable. C’est qu’elle demande qu’on s’y penche pour, au-delà des thèmes qu’elle déploie, familiers au lecteur (la mer, les oiseaux, le ciel…), en comprendre la texture, évolutive au fil des recueils (de son écriture, Marimbert dit « qu’elle bouge » – à juste titre).
Celle de L’Herbe folle, qui vient de paraître aux éditions du Cygne, laisse en un premier temps l’impression d’une prose conceptuelle (beaucoup de références à la philosophie), suivie, exécutée legato, strictement découpée, pour chaque poème, en systèmes de 16 vers partagés en quatre strophes de 6, 2, 6, 2 vers, comme un patron formel qui s’imposerait visuellement au lecteur autant qu’au poète en tant que forme où couler-mouler sa parole et en contrôler le flux. Toutefois, si l’œil la constate, c’est à l’oreille, surtout, que la poésie se fait entendre, par le rythme récurrent des vers (autour de l’octosyllabe mais sans obstination, comme rubato dans le phrasé) et surtout par un très subtil jeu d’échos et de rimes internes, comme on peut en juger dans ce court extrait :

[…] Les chevaux courent sur
la plage. Le sable à l’eau mêlé
fait de l’œil une oreille, la mer
est dans un coquillage.

Il en va d’un chant, pleinement fluide et modulé, loin de certaines écritures contemporaines hachées, heurtées, et rejetées, semble-t-il, par l’auteur :

Une phrase saucissonnée, ou un
empilage de mots banals brisent
mon échine

revenir aux choses
dites simples badigeonnées
de platitude. Agiter le mot
poésie de sa saveur le prive,

de la force de Villon

Si on ne peut pas réduire le livre à une seule réflexion sur la poésie, c’est bien quand même sur l’écriture réfléchie qu’il se focalise. Il y est question d’une méthode, de chemins parcourus sans projet, dont résulte le poème ; sans toutefois d’excès théoriques, le moi du poète, son équilibre, étant la cible de cette entreprise existentielle :  

Avancer à tâtons, quel bonheur,
quand je ne sais pas où je vais

De brouillon en brouillon, je
vais sans but, pour découvrir
ce qui sera censé m’éclairer,
une fois là. Où, quand, je ne
sais. L’action est tragique ou
n’est pas. S’écrit un journal,

sans queue ni tête.

Sans queue ni tête ? Rien n’est moins sûr, dès lors que c’est de la sorte que s’examine, dans cette logique d’exploration par le langage,

l’abyssale énigme
du sens

qui mène à s’interroger sur celui de la vie :

Vivre, n’est autre
que sans ailes voler, chercher
au sol chemin croisant le tien

quitte à puiser, pour tâcher d’en saisir le mystère, au plus creux de soi, dans une enfance obsédante, car

Accueillir le présent n’est
pas donné, sauf naïveté de
la naissance

– cela sans compter que

[…] les fleurs, même
fanées, retiennent l’origine
.

Il s’agit donc de revenir à ce

fond de soi [où] est l’enfant
immobile, recroquevillé au
milieu du vide, abandonné

où se distingue dans toute sa précision, telle une sorte de scène originelle, le souvenir très prégnant d’un accident :

Ce chien à la langue étalée
sur l’asphalte mouillé, à la
fin d’une averse de mai, tu
n’as pu le chasser de ta vie.
Tout s’est passé si vite, une
flaque dans la cour, préau
déserté. Ta première leçon

de mort, de vie accidentée.

Ici la terre, dans toute sa poignante cruauté ; ailleurs, la mémoire mène à la mer dont la surface dissimule ce gouffre, cet abîme, inquiétant sans doute, où pourtant

batifolent mille
reflets chantants, sars tigrés et
soles enfouies, rougets pétales
de mer et daurades royales

Il me semble que l’univers de Marimbert s’organise, parmi d’autres systèmes, suivant un principe de verticalité : il y a les tréfonds du souvenir, de la vie telle que vécue, qui s’impose comme thématique ; il y a l’instant présent, la perception immédiate, comme celle de cette tourterelle presque invisible dans le fouillis des cyprès, laissant à comprendre que

le corps, clos
sur lui-même, […] n’est rien
sans l’appel du cerf-volant

et couronnant le tout, se trouve ce que le poète nomme l’enfant-ciel (merveille de l’expression !) dans le poème intitulé Mastaba, ou dans l’aplomb de cette très belle évocation marine :

La mer est l’écrin des nuages,
inaccessible fluidité. Au-delà
reflété par les hauts fonds et
que le soleil dessine, rayons
célestes, traquant le poisson
du sens.


C’est cette verticalité que le poète inspecte, celle du modeste brin d’herbe qui donne son titre au recueil, de

l’herbe aimée [qui] chante la vie

et qui

face au
soleil, lanc[e] les bras griffés,
avanc[e] dans la mémoire de
vies inconnues et familières
.

Doit-on souligner qu’il s’agit là d’une poésie d’une rare beauté, très singulière dans son expression, peu sensible (et c’est tant mieux) aux canons des esthétiques contemporaines ? Il faut lire, relire, cette Herbe folle, s’en imprégner, prêter oreille et corps à ce chant original où s’exprime et s’affirme aujourd’hui toute la maturité talentueuse de Jean-Jacques Marimbert.

Le livre des visages (à propos de La Boussole des rêves, de Jean-Jacques Marimbert, aux éditions Le chat polaire)

Lire comme je le fais depuis nombre d’années Jean-Jacques Marimbert, c’est se convaincre, s’il en était besoin, qu’il est, autant que poète, philosophe. Philosophe non pas spéculatif ni descriptif :  philosophe attentif, en prise directe avec la vie, en ceci qu’il vit la vie en philosophe, que sa poésie pense l’homme dans ses rapports au monde autant qu’elle cristallise ses ressentis. Elle me rappelle, malgré de patentes différences d’écriture, celle de la chère Anna de Noailles, bien injustement dépréciée de nos jours, toute elle aussi de réflexion, d’ardeur et d’amour universel dans son appréhension fusionnelle du monde sensible – par tous ses sens, par tout son être, par tout son « cœur innombrable« . C’est pareille fusion, concentrée sur le rire essentiel, que dans son dernier recueil, La Boussole des rêves,  Marimbert exprime : comme par exemple dans ces vers d’une superbe harmonie verbale, dont la musicalité discrète crée des continuités intimes et familières, des liens cosmiques entre les « êtres et choses » unissant le grand Tout :

L’inépuisable charme des yeux rieurs, tulle nacré des
Grâces de la chair. Alors, êtres et choses, les chemins,
Les criques oubliées, les étendues de sable pur, et les
Cris des oiseaux complices, tout se met à rire, même
Le soleil, dedans, dehors. (page 54)

C’est là dire que, dans ce concert unanime (au sens fort du terme), on ne vit pas seul mais avec autrui, de quelque règne, minéral, végétal et animal, que cet autrui, que ce vivant, relève :

Les statues consultent la terre, les oiseaux, les arbres. (page 49)

En cela réside aussi la difficulté existentielle : car la vie, si elle s’identifie au monde jusqu’à s’y confondre, est, comme ce dernier, pétrie d’ambivalences, elle constitue un :

méli-mélo aussi violent 
Que doux (page 26)

formule ramassée que le poète a développée quelques pages auparavant (dans des vers quasi lucrétiens)  : en contraste avec la douceur des nuages,

Une terrible secousse fait trembler les toits,
Les arbres ploient sous la violence du choc. (page 18)

De fait, rien de ce monde n’est univoque ni stable, tout bouge, est facteur d’actions contraires. Ainsi du feu :

Quel vertige, pensant à Pompéi, sous terre le ventre
Vibre et brûle, il est le feu, la vie. Non, avant, la vie.
Elle est plus au fond, elle attend. Elle est le silence
Et va jaillir du feu, s’en nourrir, le ranimer, l’aimer (page 57)

ainsi de la pierre, « résistance et fragilité, [qui] consent à la blessure, [qui] n’humilie pas la main » (page 9).

Une telle ambivalence est toutefois nécessaire : c’est elle qui à la vie confère du sens, c’est dans les épreuves qu’on ressent le bonheur :

________________________________Être face
Au vent, noir, blanc, rouge du désert, affronter
La maladie, le gouffre, sinon exister serait vain (page 28)

_______________Un bateau racle le fond et s’échoue à
Deux encablures du sable, tu sais, où il fait bon marcher
Au matin en rêvant, mains nouées, sur une plage infinie (page 26)

« Suave mari magno« , pour le dire en termes d’épicurisme (auquel dans le texte les références ne manquent pas : cf.  « le tourbillon des atomes / Affolés de tant d’inquiétude originelle, du désordre pétri » [page 25]) : d’autant que « la mort n’a que faire de la grâce » et que « nul / N’échappe à la tempête, au soleil englouti » (page 59), sachant que c’est, malgré toutes les vicissitudes et les tribulations, la vie qui finalement l’emporte :

______________________________Les charognards
Mordent, arrachent, s’en délectent, becs et mâchoires
Claquent dans l’ombre des arbres, cadavre chaud, sang
Frais, se battent pour dire. Mais quoi, la lumière glisse (page 24)

et que

Les pousses fraîches se rient de l’histoire, long tunnel
Creusé dans la mémoire, font craquer les citadelles et
Déchirent les drapeaux (page 53)

de même :

__________________________la patience,
Seule, peut lutter contre l’incendie des forêts
Que les troupeaux redoutent. (page 20)

« Lumière », « jeunes pousses », « patience » : c’est là ce qui déjoue la mort, l’immobilité pesante des monuments, le fracas du monde, et que renforce un suprême partenaire, le visage, dont le leitmotiv, textuel comme plastique, obsède le texte (le terme apparaît 25 fois dans La Boussole des rêves, qu’illustrent 17 photographies de visages sculptés) et, partant, l’altérité dont il est porteur (si on se réfère à la philosophie de Lévinas, que Marimbert a lu, forcément lu) :

L’errance, sans terme ni fil, au gré du vent,
Des visages croisés, seule façon de caresser
Le monde, de s’y perdre pour renaître, naïf,
De narguer la mort à chaque peau effleurée. (page 67)

________________Je suis ce point fuyant, moi
Qui jamais ne fuis, parle, devant le regard autre.
Je l’ai toujours cherché, regard adoré, là, encore. (page 39)

Visage pourtant bien vulnérable :

_________À l’intérieur, parfois, le visage se
Fendille, secoué, malmené, au vide arraché (page 11)

mais animé de parole (« mot » revient 31 fois dans le texte) :_______

_________________Ouvertes, les lèvres
Sont la vie, l’amour possible. Fermées aussi,
Rouges, blêmes, violettes, pincées, pulpeuses,
Molles, riantes, arrondies, séduites, étonnées
Par le torrent des mots (page 23)

d’une parole dont le pouvoir (qui sans doute est aussi celui du poète), outrepassant l’humain, se voit investi d’une puissance magique (« carmina vel possunt caelo deducere lunam », écrivait déjà Virgile) : 

Le dernier mot n’est à personne, qui dans l’air du
Soir fait trembler les arbres (page 27)

d’une parole sans laquelle il n’est que tristesse, « douleur »

D’[…] enfant submergé par le chagrin, n’ayant
En poche aucun mot, ni regard ou épaule (page 35)

C’est d’une importance capitale : si la vie est parole, chant, elle est joie, bonheur (« Amères, nos lèvres de vivants le furent-elles jamais ? », se demandait aussi, dans une fausse interrogation, cet autre poète cosmique, Saint John Perse)

Jamais, au bout du monde, ne se lamente l’être
En ce moi de passage. […]
L’être ne désespère
Jamais, dans la noire tourmente, ivre d’embruns
Musqués, il chante. Un enfant, éternel et joyeux. (page 55)

Oh, joie des êtres étonnés d’une
Telle splendeur. (page 58)

Même les cyprès, par excellence arbres de mort,  « tremblent d’amour, de joie » (page 65).

Bonheur jamais bien loin, pour qui sait l’entreprendre, l’appréhender par les sens, et singulièrement par celui du toucher, qui met en relation charnelle, physique avec autrui, avec le monde, le cosmos : ainsi,

______________________À portée de main l’étoile
À jamais brille dans ta paume, au bout de tes doigts (page 38)

ou encore :

______________________________________Volute,
Reflet fuyant au soleil. Les mains effleurent, la caresse
Le crée. Il se rétracte, vit. Un repli. Le toucher l’efface,
Le perd, le brûle, et le retrouve intact, innocent et pur. (page 24)

Au point que le livre, « baroque » (page 70) comme on est en droit d’aimer qu’il soit par ces temps de sécheresse poétique, de presque aphasie, s’achève par l’irréalisable par nature, mais réalisable par désir, ce magnifique toucher d’un rêve :

Tu es là, mirage. Je te touche, te sculpte.
En moi, jamais ne fuit la splendeur, nue. (page 76)

*

Je crois avoir lu tous les recueils de Jean-Jacques Marimbert : de tous, La Boussole des rêves me semble le plus accompli, le plus foisonnant, sans doute aussi le plus beau, servi par une langue magnifique de maîtrise rythmique et sonore, sans de ces effets voyants qui en troubleraient l’harmonie discrètement classique et naturelle : on sent que le poète s’inspire et tire profit 

[De] l’essentiel du chant des merles et du figuier
Aux branches lourdes de fruits, dans le vent
Frais du matin (page 30)

que la vie n’a nul besoin de rhétorique pour être célébrée par cette musique qu’il aime , mêlant, dans une visée heureusement éclectique,

___________Les voix d’opéra, […]
____le chant des piroguiers, le cri

Des nuits noires, les airs de jazz. (page 9)

Tout cela que nous retrouvons dans ces pages sensibles, d’une beauté prenante et singulière, portée, autant que par l’amour universel, par une pensée qui s’y confond : leçon de vie, sans artifice, et de sincérité.


Jean-Jacques Marimbert
La Boussole des rêves
aux éditions Le chat polaire (2020)

Le chuchotis de la structure (à propos de Destin d’un ange, de Jean-Jacques Marimbert, aux éditions du Cygne)

Destin d'un angeÀ l’intéressante question si la poésie est d’essence narrative, posée dans une des dernières livraisons de la revue Triages, le regretté Robert Marteau répondait par l’affirmative : tout poème, foncièrement, raconte une histoire. Ce n’est certes pas un scoop si on envisage la poésie jusqu’à, au moins, Saint John Perse  – peut-être le dernier représentant de cette longue tradition : c’en est un, toutefois, si on examine la poésie contemporaine, peu encline au récit, s’en méfiant même comme de la peste, au point de vouloir à tout prix s’en démarquer. Sur cette base, c’est bien là, dans ce livre, la gageure de Jean-Jacques Marimbert : se démarquer de la poésie contemporaine en écrivant un très court roman, une nouvelle, sous forme d’une suite de poèmes (quarante en tout, pour Destin d’un ange) entonnés par la voix d’une narratrice.

Car ça raconte, oui, ça narre. Histoire à l’ancre d’une époque et d’un terroir ; personnages typés ; actions ; psychologie – bref, tous les ingrédients du roman traditionnel. Du reste, la quatrième de couverture explicite tout cela, et on comprendra que je ne veuille pas m’y attarder : si l’intrigue, profondément humaine, se révèle prenante – poignante, même, par moments –, là ne me semble pas résider le cœur de ce livre singulier, de ce très beau livre, que je situe plutôt dans la démarche rédactionnelle de son auteur.

*

Depuis au moins Rimbaud, la poésie, que ce soit son but ou son moyen, brusque la langue – pas toute la poésie, mais certaines de ses expressions –, dans, semble-t-il, deux directions contraires : celle de la luxuriance (Romain Fustier, par exemple, ou Michèle Dujardin), et celle de l’économie (par exemple Jos Roy). C’est cette dernière voie qu’emprunte Marimbert, dont les monologues, calés sur l’oral, vont à l’essentiel d’une parole condensée qui se perd, s’émiette, dans le silence, dans l’à-peu-près d’une syntaxe rompue, d’une phrase inachevée, balbutiante, tortueuse, rognant tout l’inutile du fatras linguistique, mais qui, si elle heurte à l’occasion l’intelligibilité du propos, le fait sans trop d’embrouille – comme on écoute, finalement, parler celle ou celui qui ne termine pas ses phrases et s’égare dans leur déroulé : pour peu qu’on s’y montre attentif, on s’y retrouve.

Cela donne, on s’en doute, un phrasé bien caractéristique – appelons ça une voix –, d’autant qu’il est mis à la forme d’une scansion nerveuse délivrée par un vers court, irrégulier (autour de six syllabes) composant d’assez longues laisses, posées roides colonnes sur la page, et par une ponctuation plus que parcimonieuse favorisant l’ambiguïté sémantique et, partant, la lecture lente et scrupuleuse (scrupulus : petit caillou pointu, au sens où on achoppe parfois, mais pour mieux avancer).

Poésie ? On aura peine, comme chez Follain, à trouver une image – si l’image caractérise la poésie – dans cette affaire de rudesse syntaxique et d’avarice langagière. Si poésie il y a – et il y a poésie, assurément –, c’est ailleurs qu’il faut la débusquer : dans ce qui manque, dans les blancs de la parole, dans des effets de rythmes, de sonorités, très subtils, plus perceptibles à l’oreille qu’à l’œil, et supposant qu’on oralise le texte écrit en marquant le tempo. Qu’on en juge par cet extrait, à mon avis très représentatif de l’écriture poétique de Marimbert – et, pour le dire en toute sincérité, de son art :

Pierre parti ne sais plus
intenable des riens
font la vie entêtés
mordre l’autre et soi
moi à vif lui la petite
des yeux de peur une main
échappée je la cajolais lui
caractère pourrissait gueulait
des bricoles dents serrées le
repas mains marteaux jamais
touché la petite souvent parti
il l’aimait sa Marion filait
dans ses jambes bêtise faite […] (p. 30)

Il serait facile, au vu de ce qui les précède et de ce qui leur fait suite, de reconstituer le continuum syntaxique et sémantique de ces quelques vers : mais qu’en resterait-il alors, qu’une forme pas assez sèche pour résonner du chuchotis de sa structure  – et sans doute peu susceptible d’être embouchée par la narratrice, tant forme et sens se conjuguent, ici, dans leur extrême condensation, pour constituer le poème dans toute sa force musculeuse, dégraissée du superflu ?

*

Un chant. Âpre, certes, mais un chant. Un court roman chanté dans la gravité de sa voix. Quelque chose de profondément beau, qui nous étreint, nous travaille la chair – le frisson n’est pas bien loin, dans certaines laisses, telles celles, magnifiques, narrant l’accouchement de l’héroïne.

J’ai découvert Marimbert et son écriture sur les réseaux sociaux, vu jour après jour s’écrire  – work in progress, c’est à la mode  – Destin d’un ange. Sans en avoir, à l’époque, mesuré toute l’ampleur  – le fragment, livré au coup par coup, ne permet pas d’en prendre pleinement conscience. Cette ampleur, je viens de la saisir en lisant l’œuvre dans sa belle entièreté, dans sa composition. Conclusion à en tirer ? Si un extrait peut nous donner quelque aperçu d’une écriture, seul le livre, s’il n’est pas simple recueil de pièces hétéroclites, peut la restituer dans son contexte et lui donner du sens. Truisme ? Mettons. Mais à lire à la suite les quarante laisses de Destin d’un ange, j’ai bien cette impression d’avoir re-découvert Marimbert, dans l’évidence, toute simple, toute bête, de celui qu’il est : un grand poète. Peut-être ne l’avais-je pas vu plus tôt. Croyez-m’en : je bats humblement ma coulpe.

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