Marcantonio Flaminio (1498-1550) : « Quand reverrai-je, hélas ! » / Ad agellum suum

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Forêt splendide, et vous, fontaines cristallines,
Et temples consacrés aux nymphes radieuses :
Que je me penserais heureux, béni des dieux,
Si je pouvais en votre sein vivre et mourir !
L’âpre nécessité qui me contraint pour l’heure
Veut que je me transporte en des pays lointains
Et que je brise ailleurs mon pauvre corps en peine.
Mais toi, Diane, toi, qui veilles sur ce mont,
Si j’ai souvent chanté, sur un doux air de flûte,
Ta louange et de fleurs couronné ton autel,
Fais-moi vite rentrer, déesse, en tes retraites.
‒ Mais que je rentre ou que les Parques s’y refusent,
Vivant, pensant à moi, je vous aurai en tête,
Forêt splendide, et vous, fontaines cristallines,
Et temples consacrés aux nymphes radieuses.


Formosa silva, vosque lucidi fontes,
Et candidarum templa sancta Nympharum,
Quam me beatum, quamque dis putem acceptum,
Si vivere, et mori in sinu queam vestro!
Nunc me necessitas acerba longinquas
Adire terras cogit, et peregrinis
Corpusculum laboribus fatigare.
At tu Diana, montis istius custos,
Si saepe dulci fistula tuas laudes
Cantavi, et aram floribus coronavi,
Da cito, dea, ad tuos redire secessus.
Sed seu redibo, seu negaverint Parcae,
Dum meminero mei, tui memor vivam,
Formosa silva, vosque lucidi fontes,
Et candidarum templa sancta Nympharum.

(In Marcii Antonii […] Flaminiorum Carmina, p. 23 [1831])


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.  Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.]

Marcantonio Flaminio (1498-1550) : L’arrivée de l’hiver / De adveпtu hiemis

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Déjà revient le froid : l’été câlin
Bat en retraite, et les feuillages tombent  
Des arbres hauts ; le vent tempéré d’ouest,
Craignant fureurs et monstrueux courroux
Du vent du nord, s’efface, et l’accompagne,
Plaisir des champs, l’oiseau chanteur : je vais
Aussi quitter la douceur des campagnes,
Jusqu’à l’avril aux superbes coiffures,
Retour des souffles tièdes du zéphyr.
Adieu, vous mes délices, les jardins,
Adieu, fontaines d’eau clairette, adieu,
Fermette plus chère à mes yeux qu’altier
Palais royal. Je pars, mais laisse ici
Ce que j’ai de sensible et de pensées.


Jam bruma veniente praeterivit
Aestas mollior, et cadunt ab altis
Frondes arboribus: tepor Favonî
Immanes Boreae furentis iras
Formidans abit: illum agri voluptas
Canorae volucres sequuntur: ergo
Et nos dulcia rura deseramus,
Dum ver purpurea coma decorum
Reducat Zephyri tepentis auram.
Horti deliciae meae valete,
Fontes luciduli valete, salve
Mihi villula carior superbis
Regum liminibus. Recedo, sensum
Sed meum hic, animumque derelinquo.

(In Marcii Antonii […] Flaminiorum Carmina, p. 25 [1831])


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.  Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.]

Marcantonio Flaminio (1498-1550) : la santé par le vin.

Nature morte avec quatre cruches (Van Gogh, 1884)

Nature morte avec quatre cruches (Van Gogh, 1884)


O vin léger, ambré, vin doux
Comme le nectar ! Vin des dieux,
Secours de ma fuyante vie !
Tu primes la liqueur d’Ausone*
Et tous remèdes salvateurs
Du découvreur des médecines.
J’avais, gisant, mal au côté ;
À demi mort ; fièvre brûlante
– Feu de fournaise –, et vers le dur
Seuil du trépas m’acheminais,
Quand, fluant en mon corps languide,
Tu soulages mon mal, liqueur
Céleste, et me rends la vie ! Docte
Damian**, ton vin et ta vigne,
Maman de mon ambré mignon,
J’en dirai de bien jolies choses
Tant que j’aurai de vie ; priant
Assidûment tous les ans Dieu
Que vent ni pluie ni sécheresse,
Grêle ou voleur hardi, ne lèse
La maman de l’ambré mignon.

*: Le vin chanté par le poète Ausone, né à Bordeaux ;
**: Damianus Damianius était un « docte » médecin sicilien.

О Vinum tenue, aureum, suave,
Instar nectaris ! o merum Deorum,
Vitae praesidium meae fugacis !
Cedant Paeonii tibi liquores,
Et quicquid remedii salubrioris
Ostendit medicae repertor artis.
Jacebant lateris dolore membra
Semimortua ; febris aestuabat
Ut fornacibus ignis, ipse plantas
Leti limina dura transferebam,
Cum tu languidulos fluens in artus,
Caelestis liquor, et levas dolorem,
Et vitam mihi reddis. Ergo, docte
Damiane, tuum merum, tuamque
Vineam aureoli mei parentem
Dulci carmine concinam, recepta
Vita dum superat mihi ; et rogabo
Votis assiduis Deum quotannis,
Ne venti, pluviaeve, siccitasve
Aut vis grandinis, improbive fures
Laedant aureoli mei parentem.

(in Marci Antonii, Joannis Antonii et Gabrielis Flaminiorum Carmina [1743] liber sextus, carmen LIX, p. 195)


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle. Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

 

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