Tu chantes de bonheur sous l’herbette, cigale :
Je gémis devant l’huis d’une fille inhumaine.
Toi tu vis de rosée : moi de pleurs ; l’estivale
Ardeur ne te nuit point : l’amour est ma géhenne.
Tu volettes partout : je gis emprisonné.
Tes chants sont chants de joie : les miens de funérailles.
Zéphyrs d’avril, vents doux, sont pour toi volupté :
Une fournaise ardente embrase mes entrailles.
Tu sautelles : un arc aveugle cloue mon cœur.
Tu es riche : et mon sort, c’est d’aimer pauvrement.
– Nous n’avons que ce point pour partage : tu meurs
En gémissant, je meurs, chétif, en gémissant.
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Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.
Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.
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Tu felix cantas molli sub fronde, cicada,
Ipse queror durae virginis ante fores.
Ros tibi dat vitam, mihi vitam fletus; adurit
Aestatis non te fervor, aduror amans.Tu quocumque libet volitas, ego carcere claudor;
Garrula tu fundis carmina, funus ego.
Tu vernis zephyris et leni flamine gaudes,
At mea succendit fervidus ossa calor.Tu nimis exsultas, ego caeco vulneror arcu;
Tu dives, sic est sors mea, pauper amo.
Hoc tantum similes, similes sumus ambo: querente
Voce peris, pereo voce querente miser.
(in Erotopaegnion [1512 ])