Apulée (123 ? – 170 ? ap. J.-C.) : deux épigrammes

Note sur la présente traduction : J’ai tenté de traduire les jeux de mots du latin (il en va surtout de paronymie) sur lesquels repose, pour partie, le sel de ces deux épigrammes. J’ai aussi reproduit, autant que la métrique du français le permettait, les nombreuses répétitions du texte originel.

— I —

Si j’aime Critias, il y aura pour toi,
Charinus, mon chéri, toujours place en mon cœur ;
N’aie crainte : feu sur feu peut bien me consumer,
Je puis sans en mourir nourrir la flamme double.
Que je sois pour vous deux ce qu’on est pour soi-même,
Et vous serez pour moi ce que sont nos deux yeux.

— II —

Ce bouquet, ma Chérie, je te donne et ces vers :
Les vers, pour toi, et le bouquet, pour ton génie.
Les vers, c’est pour, Critie, célébrer ce beau jour,
Souhaitant son retour dans quatorze printemps,
Le bouquet, pour t’orner par ces temps gais les tempes
Et de l’âge la fleur de fleurs empanacher.
Contre fleur de printemps, donne-moi ton printemps
– Ce présent passera les présents que je fais –,
Contre brassées de fleurs, embrassement charnel,
Et contre rose Eros et des baisers de feu.
Si tu viens à jouer de la flûte : mes vers
Céderont la victoire à ton pipeau charmeur.

***

***

— I —

Et Critias mea delicia est et salva, Charine,
pars in amore meo, vita, tibi remanet;
ne metuas, nam me ignis et ignis torreat ut vult:
hasce duas flammas dum potiar patiar.
Hoc modo sim vobis, unus sibi quisque quod ipse est,
hoc mihi vos eritis, quod duo sunt oculi.

— II —

Florea serta, meum mel, et haec tibi carmina dono,
carmina dono tibi, serta tuo ingenio,
carmina uti, Critia, lux haec optata canatur,
quae bis septeno vere tibi remeat,
serta autem ut laeto tibi tempore tempora vernent,
aetatis florem floribus ut decores.
Tu mihi des contra pro verno flore tuum ver,
ut nostra exuperes munera muneribus:
pro implexis sertis complexum corpore redde
proque rosis oris savia purpurei.
Quod si animam inspires donaci, iam carmina nostra
cedent victa tuo dulciloquo calamo.

(Ces deux textes sont extraits de l’Apologie, où ils interviennent comme citations d’un ouvrage d’Apulée aujourd’hui perdu)

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