Hermann Hesse (1877 – 1962) : Près d’une tombe / An einem Grabe

Il aspirait au calme, au silence, à la nuit,
Nous savons seulement qu’il cachait des souffrances,
Qu’il était fatigué. Nous l’avons allongé
Dans sa bière, et porté au lieu de grand silence.

La tombe creuse maintenant l’abrite et garde
Du monde et du temps. Là, l’homme fatigué doit
Oublier ses douleurs et reposer en paix.
Heureux qui s’échappa de cette amère époque !

Nous autres, à un monde et de bruit et de guerre,
À sa peur de la mort, à sa misère amère,
Nous avons encor part, les maux sont notre pain
Jusque pour nous aussi le rêve anxieux se brise.

Alors, croit-on, l’équilibre, le prix, le sens
Du monde se feront de nouveau jour pour nous,
Le portrait de l’humain de nouveau brillera,
Et portera du Père les traits éternels.


Er sehnte sich nach Ruhe, Stille, Nacht,
Wir wissen nur, daß er ein Leid verbarg
Und müde war. Wir haben ihn im Sarg
Gebettet und zum stillsten Ort gebracht.

Ihn birgt und schützt die tiefe Grube nun
Vor Welt und Zeit. Da soll der müde Mann
Sein Weh vergessen und in Frieden ruhn.
Wohl ihm, der dieser bittern Zeit entrann!

Uns andern bleibt vom Lärm und Krieg der Welt
Von ihrer Todesangst und bittern Not
Noch unser Teil, und Leid ist unser Brot
Bis auch für uns der bange Traum zerschellt.

Dann wird, so glauben wir, das Gleichgewicht,
Der Wert und Sinn der Welt uns wieder tagen,
Es wird des Menschen Bildnis wieder licht.
Und wird des Vaters ewige Züge tragen.


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.  Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

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Hermann Hesse (1877 – 1962) : Nuit blanche / Wache Nacht

Glauque, la nuit de föhn scrute aux carreaux,
La lune dans le bois veut se coucher.
Quoi donc me force, angoissé, tourmenté,
À m’éveiller et regarder dehors ?

Je me suis endormi et j’ai rêvé ;
Qu’est-ce qui donc au milieu de la nuit
M’a appelé, m’angoissant comme si
J’avais manqué ce qui m’eût importé ?

Mieux me vaudrait, courant, fuir la maison,
Le jardin, le village et la contrée,
Quêter l’appel et le mot enchanté,
Aller plus loin – jusqu’à quitter le monde.


Bleich blickt die föhnige Nacht herein,
Der Mond im Wald will untergehn.
Was zwingt mich doch mit banger Pein
Zu wachen und hinauszusehn ?

Ich hab geschlafen und geträumt;
Was hat mir mitten in der Nacht
Gerufen und so bang gemacht,
Als hätt ich Wichtiges versäumt ?

Am liebsten liefe ich vom Haus,
Vom Garten, Dorf und Lande fort
Dem Rufe nach, dem Zauberwort,
Und weiter und zur Welt hinaus.

(1944)


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.  Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

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