Gabriela Mistral (1889-1957) : L’Amour qui se tait / El amor que calla

Si je te haïssais, j’exprimerais ma haine
en parlant, péremptoire et pleine d’assurance ;
oui, mais je t’aime et mon amour n’a confiance
aucune en la si obscure parole humaine.

Tu le désirerais criant et qui fulmine,
mais s’élevant de si profond il a rompu
le cours de son torrent qui brûle, et disparu,
avant d’aller en gorge et d’aller en poitrine.

Je suis de même qu’un étang près du débord
et je te parais être un inerte jet d’eau.
La raison ? Ma douleur incapable de mots,
bien plus atroce que la marche vers la mort !

***

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.
Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

***

Si yo te odiara, mi odio te daría
en las palabras, rotundo y seguro;
pero te amo y mi amor no se confía
a este hablar de los hombres, tan oscuro.

Tú lo quisieras vuelto en alarido,
y viene de tan hondo que ha deshecho
su quemante raudal, desfallecido,
antes de la garganta, antes del pecho.

Estoy lo mismo que estanque colmado
y te parezco un surtidor inerte.
¡Todo por mi callar atribulado
que es más atroz que el entrar en la muerte!

(in Desolación [1922])

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