Giovanni Pontano (Joannis Pontanus) (1429-1503) : Les tourterelles et l’amour / Turtures alloquitur sciscitans eas de amoris natura

Sur un rameau couplés et branchant de concert,
Qui de concert chantez, aventureux oiseaux,
Et jouez de concert à gorge harmonieuse,
Quand d’amour concertant, et concertant de zèle,
Vous concertez d’un soin fidèle dans l’amour
(Car les nôtres varient fréquemment, nos amours),
Vous, aimables oiseaux, à l’amour si pareils,
Exemple concertant de la foi conjugale,
Dites-moi, je vous prie : quelle force est d’amour,
Si durement constante et qui se désaccorde ?
Car si l’amour se pait de chaleur et de feu,
Pourquoi donc les amants, fréquemment malheureux,
Tremblent, saisis de froid, et sous l’effet d’un gel
Par toute leur poitrine ont le sang qui se fige ?
Si cette force est froide et que d’un même gel
Elle fait frissonner ensemble toutes moelles,
Pourquoi donc les amants, fréquemment malheureux,
Brûlent tacitement de chaleur et de feu,
Par toute leur poitrine ont le sang qui s’embrase ?
Quelle est donc, qui varie fréquemment, cette force
Régissant tour à tour la chaleur et le gel ?
Ô dites-le-moi donc, vous, aimables oiseaux,
Exemple concertant de la foi, de l’amour.


Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.  Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.


Quae ramo geminae sedetis una
atque una canitis, vagae volucres,
una et gutture luditis canoro,
cum vobis amor unus, una cura,
unum sit studium et fidele amoris
(nostri nam variant subinde amores),
vos, blandae volucres, amoris instar,
exemplum fidei iugalis unum,
quae vis, obsecro, dicite, est amoris
tam constans male dissidensque secum?
Nam, si pascitur e calore et igni,
cur, o cur miseri subinde amantes
frigescunt simul et tremunt geluque
toto pectore sanguis obrigescit?
Sin est frigida vis geluque ab ipso
horrescit simul omnibus medullis,
cur, o cur miseri subinde amantes
uruntur tacito calore et igni,
toto et pectore sanguis ustilatur?
Quaen haec tam varians subinde vis, ut
alternis calore imperet geluque?
Vos o dicite, blandulae volucres,
exemplum fidei atque amoris unum.

(in Hendecasyllabi [1.22], première édition : 1505)


D'autres textes de Pontano sur ce blog :

 

Giovanni Pontano (Joannis Pontanus) (1429-1503) : Pour Focilla / Ad Focillam

Pourquoi me comptes-tu tes regards polissons,
N’as-tu donc pas pitié de mon âge avancé ?
Aime tous ces blancs-becs, donne-leur tes faveurs,
Mais ne fuis pas le vieillard que je suis, fillette.
Tu peux bien les aimer, tous ceux-ci, tous ces autres,
Mais ne repousse pas, fillette, ton amant.
Plaisirs et voluptés ? Là n’est pas mon désir :
Tes regards polissons, c’est tout ce que je veux,
Ces regards polissons que tu coules sur moi,
Riant en même temps, mais empreints de douleur,
Qui me rendent, vois-tu, ma vigueur de jeune homme.
Crois-tu ? J’oublie que je suis vieux, si par trois fois,
Ma douce Focilla, je te peux embrasser,
Fourrer deux fois ma langue en ta bouche si tendre,
– Si tu pends à mon cou l’enroulé de tes bras.

***

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.
Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

***

Lascivos male temperas ocellos,
Nec nostrae miseret tamen senectae ;
Quantumvis juvenes ama, foveque,
Dum ne me fugias senem puella,
Atque hos, atque alios ames licebit,
Dum ne me abjicias puella amantem.
Nolo delicias, libidinesque,
Lascivos oculos volo, precorque.
Lascivos quoties reflectis in me,
Et rides simul, et doles, ocellos,
Inspiras juvenis mihi vigorem.
Quin omnem simul exuo senectam,
Si ter blanda Focilla suaviaris,
Si linguam tenero bis ore sugis,
Si collo quoque complicata pendes.

(in Amores, 1513)


D'autres textes de Pontano sur ce blog :
%d blogueurs aiment cette page :