Sulpicia (1er siècle avant J. C.) : élégies V et VI

V

Quelle empathie, Cérinthe, éprouves-tu pour moi,
Ton amante, opprimée, épuisée par la fièvre ?
Je ne veux triompher de ce mal qui m’accable
Que s’il est établi qu’aussi tu le désires.
À quoi bon triompher de mon mal, si tu peux
Supporter que je souffre – en toute indifférence ?

VI

Il ne faut pas, Chéri, brûler de ces tourments
Que voici quelques jours j’ai paru t’infliger :
Ce que j’ai pu commettre, évaporée, jeunette
Je m’en repens bien plus, il me faut l’avouer,
Que de t’avoir laissé tout seul, la nuit dernière,
Désirant te cacher l’ardeur qui était mienne.

***

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.
Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

***

V

Estne tibi, Cerinthe, tuae pia cura puellae,
quod mea nunc vexat corpora fessa calor?
A ego non aliter tristes evincere morbos
optarim, quam te si quoque velle putem.
At mihi quid prosit morbos evincere, si tu
nostra potes lento pectore ferre mala?

VI

Ne tibi sim, mea lux, aeque jam fervida cura
ac videor paucos ante fuisse dies,
si quicquam tota conmisi stulta iuventa,
cuius me fatear paenituisse magis,
hesterna quam te solum quod nocte reliqui,
ardorem cupiens dissimulare meum.

Sulpicia (1er siècle avant JC) : Elégies I et II

I

Enfin l’amour est là : le voiler de pudeur
Vaut mieux pour mon renom que de le montrer nu.
J’ai tant prié Vénus en mes vers qu’elle l’a
Mené jusqu’à mon sein, et l’y a déposé.
Elle a tenu parole : et celle, réputée
N’en avoir eu son soûl, racontera mes joies.
Je ne confierai rien à mes correspondants :
Nul avant mon amant ne doit pouvoir me lire :
Heureuse de ma faute, et lasse de devoir
Feindre pour mon renom : je veux que l’on me dise
Digne de lui, comme il était digne de moi.

II

Funeste anniversaire, à passer tristement
Dans cette ennuyeuse campagne, et sans Cérinthe.
Agréments de la ville ! Une maison des champs
Une rivière froide au fond de l’Arrentin
Est-ce là ce qu’il faut à une jeune fille ?
Sourcilleux Messalla, va dormir, mon cerbère
Toujours à méditer d’inopportuns voyages !
Tu me retiens ici, mais mon cœur, mes pensées
Sont ailleurs, dusses-tu m’empêcher d’être libre.

***

Cette traduction originale, due à Lionel-Édouard Martin, relève du droit de la propriété intellectuelle.
Il est permis de la diffuser, à la condition expresse que le nom du traducteur soit clairement indiqué.

***

I

Tandem venit amor, qualem texisse pudori
quam nudasse alicui sit mihi fama magis.
Exorata meis illum Cytherea Camenis
adtulit in nostrum deposuitque sinum.
Exsolvit promissa Venus: mea gaudia narret,
dicetur si quis non habuisse sua.
Non ego signatis quicquam mandare tabellis,
ne legat id nemo quam meus ante, velim,
sed peccasse juvat, vultus conponere famae
taedet: cum digno digna fuisse ferar.

II

Invisus natalis adest, qui rure molesto
et sine Cerintho tristis agendus erit.
Dulcius urbe quid est? an villa sit apta puellae
atque Arrentino frigidus amnis agro?
Iam nimium Messalla mei studiose, quiescas,
neu tempestivae saepe propinque viae!
Hic animum sensusque meos abducta relinquo,
arbitrio quamvis non sinis esse meo.

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